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La correction des élèves: une tâche peu banale!

9 octobre 2018 - par valerieboisvert

 

Depuis quelques jours, je prends conscience à quel point il peut être difficile de se concentrer sur plusieurs éléments en même temps. En effet, je trouve cela difficile de me concentrer pour corriger des phrases d’élèves en même temps que je veux assurer une bonne présence en classe et du même coup une bonne gestion de classe, que je dois surveiller l’heure afin de respecter l’horaire, etc. Je sais que tous ces éléments font partie des tâches régulières de l’enseignant. Je crois que je serai capable de les assurer lorsque je pourrai adapter le fonctionnement de la classe à un modèle qui me correspond. Je me connais bien et je sais que, pour me sentir vraiment présente auprès des élèves, je dois être active en classe. Cependant, pour le moment, je dois répondre aux exigences du milieu et je dois apprendre à corriger lorsque les élèves sont présents.

 

J’ai essayé plusieurs moyens afin de m’aider à me concentrer à la tâche de correction : le faire pendant l’heure du diner, relire les phrases plusieurs fois, corriger chacun des élèves à deux ou trois reprises. Cependant, je continue de constater des failles dans mes moyens. En effet, j’oublie parfois de corriger certaines fautes. Je crois que je vais devoir y aller par étape. Au lieu de regarder l’ensemble du travail d’un élève, je crois que je vais devoir vérifier un élément à la fois. Par exemple, je vais devoir vérifier d’abord la présence de la majuscule et du point ; ensuite la structure de la phrase, les accords et la conjugaison ; puis l’orthographe des mots. Je crois que je vais devoir faire cela pour chacun des élèves, avant de passer à l’écriture des commentaires, après avoir consulté tous les travaux des élèves. Ainsi, je m’assurerai une certaine cohérence dans mes corrections.

 

Des questionnements importants

De plus, je me questionne aussi sur un élément de cette tâche : doit-on corriger toutes les fautes d’orthographe des élèves ? Doit-on laisser une certaine autonomie aux élèves en pointant seulement qu’il y a une erreur dans une phrase et qu’ils doivent la trouver et la corriger eux-mêmes ? Doit-on parfois simplement laisser aux élèves le plaisir d’écrire ? Est-ce que le fait de tout corriger leur permet réellement d’apprendre ? Vont-ils mieux assimiler les notions en voyant les corrections ? Quelle relation avec l’erreur cela peut-il provoquer chez les élèves ?

 

 

Mes hypothèses :

À mon avis, il y a des moments où l’on doit souligner toutes les erreurs et où les élèves devraient être invités à les repérer et les corriger eux-mêmes. Cette correction ayant un objectif formatif, afin que les corrections puissent apporter un apprentissage à l’élève.

 

Pendant d’autres moments, rien ne devrait être corrigé, mais simplement relus et « traduit » (si l’élève a écrit un mot au son et que les autres adultes pourraient avoir du mal à relire) par l’enseignant. Cette activité ayant comme objectif de motiver l’élève à écrire.

 

Afin de vérifier mes hypothèses, j’ai décidé de consulter ce que Yves Nadon disait sur le sujet. En voici un extrait :

 

« Les implications pratiques de la connaissance et de la reconnaissance des aspects développementaux de l’orthographe et de l’écriture sont multiples :

 

L’orthographe doit être évaluée de façon analytique et non seulement sous l’angle de la justesse. On peut apprécier comme parents et enseignants l’évolution des connaissances vers une maîtrise des compétences. Il faudra changer nos regards et considérer les erreurs, ainsi que l’écrivait Brian Cambourne (1988), comme approximations. Ce mot est en soi beaucoup plus juste.

 

L’orthographe est analysée sous l’angle des stratégies d’élèves. On peut mieux découvrir ce qu’ils savent et prendre des décisions d’enseignement plus éclairées (ça ressemble à la lecture, non ?).

 

Le regard de l’enseignante sur l’orthographe devient celui d’un professionnel informé plutôt que celui d’un correcteur d’examen. Évaluer l’orthographe exige de l’enseignant des connaissances linguistiques, des connaissances sur l’étape du développement en orthographe, sur les diverses personnes qui peuplent une classe et sur les stratégies d’épellation. De là découlent des décisions d’enseignement.

 

La notion voulant que seule la mémoire soit essentielle à une bonne orthographe est dépassée. Les élèves doivent construire leurs connaissances sur la langue, en mettant en place un échafaudage mental qui permet d’assimiler les conventions et, par la suite, d’écrire sans fautes les mots inconnus. Ils doivent donc lire beaucoup.

 

Ces implications ne valent pas que pour la 1re année. La compréhension de l’orthographe, comme toute autre chose, est évolutive et ne dépend pas seulement de l’effort et de la concentration fournis par les élèves, mais aussi seulement de la qualité de leurs interactions avec l’écriture et la lecture. Si l’on ne fait que constater qu’un élève fait des fautes, si l’on ne fait que lui dire de mieux apprendre ou de mieux se corriger, notre rôle dans sa croissance sera presque nul. Pour reprendre un exemple précédent, dire à un joueur de tennis qu’il se trompe et lui demander de travailler plus fort ne changera sûrement pas de façon importante la qualité de son jeu. Nous devons, sur tous les plans, analyser les erreurs et enseigner en fonction de nos observations. Nous ne pouvons agir autrement, compte tenu des connaissances actuelles. Il doit y avoir en écriture, comme en lecture, un enseignement direct sur des difficultés observées. Certains ont des difficultés avec la ponctuation, les lettres muettes, les accords, le vocabulaire ou certains sons ; d’autres n’intègrent pas les mots rencontrés en lecture ou pratiqués, se corrigent peu, maîtrisent mal les étapes de correction, écrivent avec peu de profondeur et d’intérêt, ont du mal à trouver des sujets… Les difficultés sont nombreuses et variées. Elles exigent un enseignant qui se questionne, écrit (l’écrirai-je jamais assez ?), connaît les processus utilisés et aime la lecture.

 

[…]

 

Les élèves doivent lire beaucoup de livres de qualité et baigner dans un environnement de savoir, dont les enseignants sont partie prenante. Il faut finalement considérer leurs idées avec respect. Il est dommage que beaucoup d’élèves apprennent à l’école qu’ils n’ont rien à dire, sauf si on le leur demande. Dans la plupart des cas, si on ne leur impose pas un sujet d’écriture, ils n’écrivent pas.

 

Il faut expliquer tout cela aux parents en leur rappelant comment ils ont enseigné à parler à leurs enfants, et en leur montrant de nombreux exemples d’évolution de l’écriture de certains élèves. La plupart comprennent le bien-fondé de cette démarche : eux aussi célèbrent le travail de leur enfant et son évolution. […] »

 

- Tiré de: Yves Nadon, 2011, Lire et écrire en première année... et pour le reste de sa vie, Éditions Chenelière Éducation, 256 pages.

 

- Tiré de : Analyse réflexive stage III, semaine VI (du 24 au 28 novembre 2014)

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